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IDENTITES & TERRITOIRE - 2014 > 2016

IDENTITIES & TERRITORY

                                    

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IDENTITES ET TERRITOIRE

 

 

          Les œuvres de Loïc Casteluccio s’enracinent d’emblée dans le territoire de la pensée. Le titre même de son exposition indique que ses créations relèvent du domaine de la philosophie. Il ne s’agit pas de mettre en forme des concepts. Son esthétique n’est pas celle d’un formalisme creux dont on aurait à tirer des conséquences intellectuelles à partir d’une absence de sensations. Identités et territoire sont des concepts philosophiques travaillés comme de la matière. Ses œuvres nous montrent le travail des idées à l’intérieur d’un langage de symboles. Elles nous donnent à voir et à penser. Elles ont affaire autant avec la pensée qu’avec nos affects. Chez Loïc Casteluccio, l’art est le domaine expressif où les idées engendrent leurs formes et où ces formes reconstruisent le visage des idées. Le territoire est le reflet d’une carte mentale. L’identité n’est pas la volonté illusoire de l’identique. Prise dans le champ complexe du territoire, l’identité est avant tout un mouvement, une aventure, un croisement possible entre plusieurs chemins. Ses ajointements imposent à l’identité son pluriel. Le « Je » ne vaut que dans la multiplication des perceptions et des perspectives sur lui-même.

         

          Le territoire du masque océanien, de la flèche et des fusains est à l’opposé d’une stabilité identitaire. Les identités qui peuvent s’y rencontrer, vous, moi, lui, sont aspirées dans le territoire du pli, du pliage, du volume, du vide, de la frontière, du nombre aussi qui commande les rapports internes d’équilibre de la structure. Ses œuvres possèdent une harmonie de proportions à l’image de la figuration océanienne du masque, du triptyque des flèches qui relèvent du geste calligraphique quand c’est l’intention qui doit être aperçue par l’œil comme on capte sur son visage le passage du vent plus que le vent lui-même. Loïc Casteluccio ne conçoit donc pas le territoire comme un lieu clos où les mouvements s’annihileraient à force de tourner en rond, où les identités elles-mêmes voleraient en éclats à force de rechercher un identique, une figure ultime, un néant de soi. Ce qui se manifeste dans son travail, c’est le souffle de la création joint à la vitalité d’une conscience qui ne cesse de s’appréhender à travers des identités multiples rendues possibles grâce au territoire de la pensée.

 

          Loïc Casteluccio nous invite à retrouver la dimension de l’œil qui voit et de l’idée qui pense. Le territoire que ses œuvres dégagent est celui de la pensée qui sent. Les sensations sont celles des réseaux en labyrinthe, des surfaces produites par le raclement du fusain sur le papier en ondes noires et vagues grises, de masques guerriers en motifs de tatouage (Masque 1) ou de métal découpé au plasma selon une architecture sériale (Masque 3). Dans son approche gestuelle, on ne peut s’empêcher de penser au calligraphe chinois pour qui peindre et écrire sont l’expression d’un seul et même mot. Le geste est celui de la pensée. Peindre, écrire, sculpter sont une seule et même chose. Ce qui est maintenu vivant dans ses œuvres, c’est la connexion de ce que nous sommes avec le Tout. Ses œuvres sont l’expression d’une puissance. Cette puissance augmente l’intensité de vie. Son art est donc au service de la vie.

 

Thierry Charton, écrivain, writer

Nouméa 2016

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